Sécurité sociale des auteurs. Confirmation : rien ne va plus

Le groupe de travail « affaires sociales » du Conseil Permanent des Écrivains (CPE) a été reçu ce matin au ministère des Affaires sociales pour une réunion de « concertation » sur le dossier général de la sécurité sociale des auteurs (principalement Agessa). Un représentant du ministère et deux représentants de la DSS (direction de la Sécurité sociale) nous ont accueillis. La réunion a duré une heure trente. Pour un résultat à peu près nul.

Sur l’évolution des dossiers en examen :

  • Création d’un nouveau système informatique commun à l’Agessa et à la Maison des Artistes-sécurité Sociale (MDA-SS)
  • Remboursement rapide et automatique des trop-perçus
  • Règlement du passif de l’Agessa : précompte abusif sur les déclarants en BNC (ils sont prélevés sur leurs recettes alors que légalement, ils doivent l’être sur leur bénéfice)
  • Fusion des deux organismes en une caisse commune à l’ensemble des artistes auteurs.

Sur toutes ces questions : RIEN, aucune réponse tangible de nos interlocuteurs, et spécialement du porte-parole du ministère.

Nous avons par ailleurs constaté que notre interlocuteur mélangeait allègrement (et dangereusement) statuts des salariés et statuts des indépendants. Des rumeurs inquiétantes ayant circulé récemment quant à notre possible rattachement au RSI (Régime Social des Indépendants), nous avons tendance à froncer le nez, le fonctionnement de celui-ci étant déjà largement critiqué par ceux qui en pâtissent.

Notons que cet inacceptable retour à la case « travailleurs indépendants » aboutirait à une régression de trente à cinquante ans de nos acquis sociaux. La MDA-SS, et plus tard l’Agessa, ont précisément été créées pour remplacer ce statut, qui ne convenait pas à nos activités.

Le seul éclaircissement que nous ayons obtenu concerne les auteurs qui, mal informés du système Agessa, n’auraient payé aucune cotisation retraite. Ils auront droit de racheter des trimestres à partir du moment où le « nouveau précompte » (voir plus bas) aura été mis en place. Ce système ne fonctionnera, semble-t-il, pas plus de trois ou quatre années à compter de sa mise en place. Les gens concernés devront alors racheter toutes les périodes prescrites et ne pourront pas faire valoir des périodes précises de leur carrière d’artiste auteur. Sous-entendu : aucune souplesse à attendre des pouvoirs publics sur ce sujet.

Côté « négociations générales », le ministère a prévu « une prochaine réunion de concertation organisée rapidement » (sic). Cette réunion, prévue d’assez longue date, ne devrait porter que sur les revenus « accessoires » ou « dérivés », et non sur le fond du dossier. Sur celui-ci, le ministère a accepté le principe d’une autre réunion, avec un petit groupe cette fois, aux alentours du 23 novembre 2015. Mais encore une fois, cette annonce est entourée d’un flou artistique qui a de quoi laisser sceptique la représentation des auteurs.

La question du RAAP n’a pas été abordée, n’étant pas à l’ordre du jour. Le représentant du ministère dit avoir lu mais non reçu le courrier que 20 organisations lui ont adressé à ce sujet. (Oui, vous bien lu : il n’a pas reçu, mais il a lu…) Aucune autre réponse de sa part sur ce sujet.

Autre point négatif : la proposition du ministère qui consiste à nous proposer un abattement du taux de cotisation, aligné sur le régime propre aux VRP (qui ont comme nous des « employeurs » multiples). Cet abattement, dont on ignore le taux, ne profiterait qu’aux plus aisés, et coûterait de l’argent à tous les autres. Le groupe de travail du CPE l’a unanimement accueilli en faisant la grimace.

Les seules infos que nous ayons glanées ont été lâchées du bout des lèvres.

  • 1 – La première concerne la date d’application du nouveau précompte pour les assujettis et affiliés des deux régimes (Agessa + MDA-SS). Ce ne sera pas en 2016, c’est douteux pour 2017, possible pour 2018 et… obligatoire pour 2019.

Ce nouveau précompte (ce que les auteurs paient en cotisations via l’éditeur) inclura comme toujours CGS-CRDS, cotisations sécu maladie et maternité, mais les cotisations retraite de base seront, de la même façon, prélevées « à la source ».

Avec cette cotisation nouvelle, le taux de prélèvement des assujettis s’élèvera à 16,5% au lieu d’environ 9,5% actuellement.

Ce qui n’est pas sans poser bon nombre de problèmes… Sans la moindre réponse de nos interlocuteurs !

Les fonctionnaires par exemple, qui représentent tout de même 20 % des quelque 195 000 assujettis à l’Agessa, sont normalement exonérés de ces cotisations. Les retraités devraient l’être aussi, ou en tout cas bénéficier d’un taux réduit – comme prévu par exemple dans le cas du RAAP. Même souci pour ceux dont les revenus cumulés dépasseraient le plafond de sécurité sociale : il ne semble pas prévu de leur rembourser les trop-perçus.

S’il y avait eu une avancée quelconque sur ce dossier, le SELF aurait mis sur la table la question de savoir ce qui se passera durant l’année où sera mis en place ce précompte « intégral » : quid alors des affiliés Agessa et MDA-SS ? Ils devront théoriquement payer cette année-là deux années de cotisations retraite : celle due à l’Agessa pour l’année précédente en plus de celle prélevée à la source… Étant donné l’absence de réponse sur le cœur du sujet, il n’a pas semblé opportun de la poser.

Cette gestion pour le moins autoritaire devrait prochainement nous inciter à conseiller aux auteurs d’abandonner le système des déclarations en traitement et salaires au profit de la déclaration en BNC (bénéfices non commerciaux), encore plus rentable dans le contexte qu’on nous décrit.

  • 2 – La seconde « information » n’a été communiquée qu’en « sous-texte », comme disent les scénaristes. Il s’agit donc plutôt d’une déduction fondée sur ce que notre interlocuteur a déclaré :

Le ministère semble accepter le principe d’une retraite trimestrielle basée sur le régime des salariés : l’équivalent de 150 heures de smic, soit 600 heures par an au lieu des 900 actuellement en vigueur.

Mais répétons qu’il ne s’agit que d’une déduction (optimiste) faite à partir du discours d’un représentant pas aussi au fait des dossiers que nous l’aurions voulu. Et qui donc peut se tromper…

Pour résumer, le résultat de cette rencontre tient en un mot : RIEN.

La seule et unique préoccupation actuelle du ministère des Affaires sociales en ce qui concerne le régime des artistes auteurs est de faire gonfler le montant de leurs cotisations.

PS : Notre interlocuteur recevait dans la foulée des représentants des salariés d’Air France ; ce doit être pour cela qu’il portait une chemise blindée…